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Le parlement des sirènes
«Aux premiers jours, quand les premiers T’skrangs nageaient
la grande rivière, nous partagions les eaux avec une race
de créatures appelées sirènes. Les sirènes
nous causaient beaucoup d’ennuis, mais pas parce qu’elles
étaient mauvaises ou terribles, comme des thérans
ou des horreurs. Bien qu’il soit vrai que les elfes les craignaient,
car il arrivait qu’elles subtilisent un de leurs enfants et
le transforme en sirène. Mais, nous, les t’skrangs
n’avions pas peur d’elles, car elles étaient
comme nous. Elles chantaient et racontaient des histoires, elles
construisaient des maisons pour y vivre, elles aimaient leurs enfants
et voulaient la paix avec leurs voisins. Mais les bonnes intentions,
ça n’a jamais suffit à faire de vous un bon
voisin, et les sirènes n’en étaient pas ! Elles
pensaient qu’elles étaient plus belles qu’un
couché du soleil, que leurs farces étaient plus brillantes
que toutes autres, et que leurs voix étaient plus apaisantes
qu’un doux vent dans la voile d’un navire.
« Parce qu’elles ne voyaient pas le mal qu’elles
pouvaient faire, elles ne comprenaient pas pourquoi nous ne les
aimions pas. Elles se faisaient amis avec les poissons que nous
chassions et nous ne pouvions donc plus les pêcher pour nous
nourrir ; elles nageaient où bon leur semble sans faire attention
à nos navires, entraînant de stupides accidents ; elles
avaient la faculté de devenir aussi liquide que l’eau
et elles pouvaient donc, à tout moment, entrer dans nos maisons
et s’inviter à nos tables, sans prévenir, riant
à notre exaspération.
« Un jour, Rossaruss, le représentant des T’skrangs,
fut envoyé au parlement des sirènes pour que cela
cesse. Leur parlement était fort désordonné
et bruyant, construit dans une magnifique tour. Là, Rossaruss
apparut aux sirènes, mais celles-ci se moquèrent de
lui. Elles lui expliquèrent que la rivière leur appartenait,
et que nous devrions être honoré de la partager avec
elles. Elles lui jouèrent une magnifique complainte afin
de réparer leur tords.
« Mais une chanson n’y suffisait pas. Rossaruss, l’esprit
clair, observa alors les poissons qui étaient subjugués
par la complainte : il y en avait trois sortes dont on pouvait croire
qu’ils pleuraient devant tant de beauté.
« Au retour de Rossaruss, tous les t’skrangs se mirent
en chasse de ces poissons, qu’ils capturèrent dans
de grande cage en roseaux. Bientôt, Rossaruss était
rappelé au parlement des sirènes. Là, elles
lui expliquèrent que ces poissons étaient sacrés
pour elles, car ils représentaient la mémoire et les
passions de leur peuple. Mais Rossaruss refusa de les leur rendre.
Enervés par la situation, les sirènes menacèrent
alors notre peuple de quitter à jamais la Serpent river,
si les t’skrangs ne libéraient pas les poissons. Bien
sur, Rossarus refusa.
« Les sirènes ne pensèrent même pas que
Rossaruss serait prêt à prendre le risque de se passer
de la compagnie de créature aussi parfaite qu’elles.
Mais elles étaient bien trop fières pour revenir sur
leur parole, donc elles commencèrent leurs préparatifs.
Jusqu’au dernier moment, elles pensèrent que Rossaruss
reviendrait sur sa promesse et relâcherait les poissons, mais
celui-ci les regarda partir, leur lançant un « au revoir
» ironique, et plaisant.
« Depuis ce jour, la rivière est libérée
des sirènes, et si jamais vous apercevez des cages de roseaux
avec d’étranges poissons, surtout laissez-les. On ne
veut pas revoir ces poissons insupportables dans nos eaux !
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